La veillée des JMJ est traditionnellement rythmée par des spectacles et des témoignages. Cette année à Panama, la parole a été donnée à deux Panaméens, la maman d’une petite fille trisomique et un ancien toxicomane qui a pu sortir de la drogue grâce à la Fondation saint Jean-Paul II, et à une jeune chrétienne palestinienne qui avait fait sa première communion lors des JMJ de Cracovie et a vécu depuis une intense parcours d’approfondissement de la foi.
Un spectacle a été présenté sur le thème de l’Arbre de Vie, qui a donné au Pape l’occasion d’expliquer, dans son discours, que «la vie que Jésus nous offre est une histoire d’amour, une histoire de vie qui veut se mêler à la nôtre et plonger ses racines dans la terre de chacun». Le Pape François a insisté sur la dimension concrète et charnelle de cette relation au Seigneur : «Cette vie n’est pas un salut suspendu “dans les nuages” attendant d’être déversé, ni une “application” nouvelle à découvrir, ni un exercice mental fruit de techniques de dépassement de soi. Elle n’est pas non plus un “tutoriel” avec lequel on apprendrait la dernière nouveauté. Le salut que le Seigneur nous offre est une invitation à faire partie d’une histoire d’amour qui se tisse avec nos histoires ; qui vit et veut naître parmi nous pour que nous donnions du fruit là où nous sommes, comme nous sommes et avec qui nous sommes», a-t-il souligné.
L’exemple de Marie, une femme qui a bouleversé l’histoire
Le Seigneur avait surpris Marie en l’invitant à «faire partie de cette histoire d’amour», donnant donc ainsi un sens et un relief inattendus à sa vie. «Bien sûr, la jeune de Nazareth ne sortait pas sur les “réseaux sociaux” de l’époque, elle n’était pas une “influencer”, mais sans le demander ni le rechercher, elle est devenue la femme qui a le plus influencé l’histoire ».
Son “oui” ne fut pas le signe d’une «acceptation passive ou résignée», a précisé le Pape François, mais au contraire «le “oui” de celle qui veut s’engager et risquer, de celle qui veut tout parier, sans autre sécurité que la certitude de savoir qu’elle était porteuse d’une promesse». François a donc souligné le “oui” vécu par Erika et Rogelio, le couple qui a accueilli la naissance de leur petite fille trisomique, Ines, remarquant leur phrase qui a été le signe d’un engagement libre mais définitif : «À la naissance de notre fille, nous avons décidé de l’aimer de tout notre cœur.» Un engagement concret qui a constitué une manifestation de cette réalité simple mais que beaucoup ont peur d’appréhender : «Dire “oui” au Seigneur, c’est oser embrasser la vie comme elle vient, avec toute sa fragilité, sa petitesse et, souvent, avec toutes ses contradictions et ses insignifiances.»
Aimer, c’est se rendre disponible pour être sauvé
«Seul celui qui aime peut être sauvé», a martelé le Pape François. «Seul celui qui embrasse peut être transformé. L’amour du Seigneur est plus grand que toutes nos contradictions, nos fragilités et nos petitesses, mais c’est précisément à travers nos contradictions, nos fragilités et nos petitesses qu’il veut écrire cette histoire d’amour. Il a embrassé le fils prodigue, il a embrassé Pierre après son reniement et il nous embrasse toujours, toujours, après nos chutes, en nous aidant à nous relever et nous remettre sur pieds. Parce que la véritable chute, celle qui est capable de ruiner notre vie, c’est de rester à terre et ne pas se laisser aider.»
Le Pape souligné le témoignage du jeune Panaméen sorti de la toxicomanie, Alfred, dont le parcours a dérapé avec l’expérience du chômage. Vivre «sans travail, sans éducation, sans communauté, sans famille» ouvre la voie à des conduites à risque. «Il est impossible que quelqu’un grandisse s’il n’a pas de racines fortes qui aident à être bien soutenu et enraciné dans la terre. Il est facile de “se faire exploser”, quand il n’y a pas de lieu pour se fixer», a souligné François, invitant les plus âgés à s’interroger sur les racines qu’ils transmettent aux autres.
Beaucoup de jeunes se sentent invisibles, ne trouvent d’espaces dans lesquels ils pourraient être appelés. «Nous le savons bien, il ne suffit pas d’être toute la journée connecté pour se sentir reconnu et aimé. Se sentir considéré et invité à quelque chose est plus important qu’être “sur le réseau”. Cela signifie trouver des espaces où ils peuvent avec leurs mains, avec leur cœur et avec leur tête se sentir faire partie d’une communauté plus grande qui a besoin d’eux et qui a aussi besoin de vous».
Le Pape a rappelé l’intuition de don Bosco, qui avait su aller vers des jeunes en difficulté, quitte à choquer les bien-pensants de son époque. «Beaucoup vivaient dans la même ville, beaucoup critiquaient ces jeunes, mais ils ne savaient pas les regarder avec les yeux de Dieu. Lui l’a fait, et il osé faire le premier pas : embrasser la vie comme elle se présente et, à partir de là, il n’a pas eu peur de faire le second pas : créer avec eux une communauté, une famille où, avec le travail et l’étude, ils se sentent aimés. Leur donner des racines où se fixer pour qu’ils puissent parvenir au ciel». Cette intuition reste pleinement valable aujourd’hui. «Être un “influencer” au XXIème siècle, c’est être gardien des racines, gardien de tout ce qui empêche que notre vie devienne évanescente, s’évapore dans le rien», a expliqué François.
Le monde sera meilleur si l’on croit à la force de l’amour de Dieu
François a souligné aussi l’expérience de la Palestinienne qui avait témoigné, Nirmeen, qui lors des JMJ de Cracovie avait rencontré «une communauté vivante, joyeuse, qui est sortie à sa rencontre, qui lui a donnée une appartenance et lui a permis de vivre la joie qu’implique être rencontrée par Jésus».
«L’Évangile nous apprend que le monde ne sera pas meilleur, parce qu’il y aurait moins de personnes malades, faibles, fragiles ou âgées dont il faut s’occuper, pas même parce qu’il y aurait moins de pécheurs. Mais il sera meilleur quand plus nombreuses seront les personnes qui, comme ces amis, seront prêts et oseront concevoir demain et croire en la force transformatrice de l’amour de Dieu.»
Le Pape a enfin invité les jeunes à se préparer à «rencontrer Jésus vivant dans l’adoration eucharistique». «Devant lui, face à face, n’ayez pas peur de lui ouvrir votre cœur, qu’il renouvelle le feu de son amour, qu’il vous pousse à embrasser la vie avec toute sa fragilité et sa petitesse, mais aussi avec toute sa grandeur et sa beauté. Qu’il vous aide à découvrir la beauté d’être vivants», a exhorté le Saint-Père.
Un temps d’adoration
La fin de la veillée a été marquée par l’adoration du Saint Sacrement. Le Saint Père et les 600 000 jeunes présents ont partagé un temps de silence et de prière devant Jésus Eucharistie; l’ostensoir était déposé dans les mains d’une statue dorée de la Vierge Marie. Le silence, impressionnant, n’a été interrompu que par quelques notes de piano, les chants, et des prières.