Bien chers frères et sœurs en Christ, et vous tous qui vivez cette nuit pascale avec nous par l’écoute de Radio Teriya, que la joie et la paix pascales soient toujours avec vous !
Au commencement de toute bonne nouvelle, il y a toujours un temps d’étonnement. Cet évangile que nous venons d’entendre est parcouru par un long étonnement. Tous sont étonnés ! Mais, avant d’en arriver à cet étonnement du matin de Pâques, le terrain a été préparé longuement et par toute une série d’étonnements, des étonnements qu’ont vécus les héritiers de la première alliance quand peu à peu ils ont appris à comprendre, à connaître le vrai visage de Dieu.
Nous avons parcouru très rapidement ce chemin à travers quatre lectures du premier testament. Quatre lectures qui marquent quatre étonnements. Il y en aurait d’autres que l’on aurait pu choisir. Permettez-moi rapidement de pointer ces étonnements pour que nous puissions les partager nous aussi en cette nuit sainte.
La première lecture nous a relaté la création : ce poème dit en langage poétique, imagé, la merveille première du fait qu’il y ait quelque chose plutôt que rien. Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Grande question philosophique que je ne suis pas le premier à poser et certainement pas le dernier. Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?
Parce qu’il y a une volonté derrière tout ce qui est, une volonté aimante, un désir de bien. « Dieu vit que cela était très bon ». Premier étonnement : malgré tout ce que nous voyons dans le monde qui peut parfois nous inviter à la dépression ou au moins au pessimisme, la Bible nous rappelle que « Dieu vit son œuvre » et qu’elle était « très bonne ». Le monde est bon, premier étonnement. Nous sommes invités à porter sur la Création, malgré tous ses changements climatiques, un regard de foi. Dieu est à l’œuvre, travaillons avec lui.
Deuxième étonnement dans ce texte dur que nous avons entendu du sacrifice d’Isaac par son père Abraham. Dieu l’arrête : « Ne porte pas la main sur l’enfant ! » Cet étonnement, c’est la découverte d’un Dieu qui ne pactise pas avec la mort, qui n’utilise pas le mal. Il est le Dieu des vivants et non pas des morts. Parfois, nous avons dans le cœur des images brouillées de Dieu. Nous croyons qu’il nous demande des choses difficiles, et plus c’est difficile meilleur ce serait. Non ! Dieu n’est pas comme cela. Il n’attend rien d’autre de nous que notre confiance, notre écoute, notre réponse. Dieu ne pactise pas avec le mal. Il n’est pas l’ami de la violence et de la mort.
Dans le troisième texte, le récit de l’Exode, de la sortie de l’Egypte, de la libération de l’esclavage, nous avons un Dieu qui non seulement est créateur et qui n’est pas complice de la mort, mais un Dieu qui s’implique dans l’histoire humaine, dans les histoires concrètes de la vie des hommes. Non pas un Dieu lointain, assis sur son nuage et qui nous observerait de loin avec sa longue vue en disant « Courage ! », mais un Dieu qui s’implique, qui « se mouille » tel Moïse pour traverser la mer Rouge.
Dieu se mouille, Dieu s’implique. Dieu sauve. Dieu fait alliance avec un peuple qu’il choisit. Dieu est proche. Quel étonnement ! Aucune tradition humaine n’avait imaginé cela ; Dieu s’implique dans les histoires humaines, Il s’intéresse à nous.
Quatrième étonnement dans le quatrième texte que nous avons entendu, tiré du livre du prophète Isaïe ; non seulement Dieu s’implique, mais il s’engage envers son peuple par une alliance éternelle. Mais si Dieu fait alliance avec un peuple, c’est pour le bien de tous parce qu’il a en vue le salut de toute l’humanité. Oui Dieu veut sauver tous les hommes, tous les peuples. Il les appelle tous à se rassembler pour former un seul peuple, un peuple racheté, un peuple sauvé.
Avant l’étonnement du matin de Pâques, il y a donc beaucoup d’étonnements que nous pouvons nous-mêmes accueillir. Au matin de Pâques, voilà le tombeau descellé, la pierre roulée. La pierre apparemment solide, le roc d’une certitude désespérée : il est mort. Cette pierre a roulé et les certitudes désespérées peuvent disparaître pour faire place à une espérance nouvelle. Le tombeau est vide. Le vivant a vaincu la mort : le vivant était mort, le mort a vaincu et Il est ressuscité. « Pourquoi cherchez-vous le vivant parmi les morts ? » demandent les anges. Là, nous sommes devant l’étonnement suprême.
Ce n’est pas nous qui nous étonnons, ce sont les anges du Seigneur qui s’étonnent de notre étonnement. « Mais pourquoi êtes-vous surpris ? Il vous l’avait annoncé. Il vous précède en Galilée. Il vous l’avait dit … » Les anges, eux, savent qu’on peut croire Dieu sur parole et s’étonnent que nous ne fassions pas comme eux. Ils s’étonnent de notre étonnement.
Oui, il y a beaucoup d’étonnement au matin de Pâques, mais cet étonnement va déboucher et peut déboucher sur un émerveillement, une action de grâce : la Bonne Nouvelle est croyable. Elle est totalement étonnante, plus qu’étonnante, elle est bien dans les façons de faire de Dieu. C’est une vraie Bonne Nouvelle. Nous sommes ses enfants. Il nous invite à partager sa vie en reconnaissant en Jésus Celui qui nous donne sa vie et qui nous sauve de la mort.
La victoire du Christ nous ouvre une espérance. La victoire du Christ n’est pas seulement la Sienne ; il nous la partage, il nous en fait profiter. Il nous en fait vivre. Il nous prend avec lui dans sa victoire si nous le voulons bien. Et le chemin de cette victoire, c’est le baptême. Le baptême que nous avons reçu pour la plupart d’entre nous. Le baptême que vont recevoir 75 personnes parmi nous en cette nuit, et d’autres suivront demain dans les jours à venir. Par le baptême, saint Paul nous l’a rappelé dans sa lettre aux Romains : « Nous sommes plongés dans la mort avec le Christ ». Par le baptême, nous sommes déjà morts, tous. Mais tous nous sommes avec Lui, ressuscités, sortis du tombeau, capables d’une vie nouvelle, d’une vie libérée des forces de mort qui nous entraînent vers le bas, qui nous défigurent. Oui, frères et sœurs, nous sommes émerveillés ce soir de ce que Dieu fait pour nous, émerveillés du don de Dieu.
Vous, frères et sœurs qui recevrez le baptême, puis confirmés plus tard pour être marqués du sceau du Saint Esprit, le don de Dieu, la force même de Dieu qui vient en vous faire son œuvre ; laissez-vous transformer par la grâce divine afin d’être capable d’aimer comme Lui Jésus.
Pour nourrir cette vie d’enfant de Dieu, cette vie éternelle, cette vie nouvelle, voilà que le plus impossible, le plus improbable, le plus étonnant advient : Jésus se fait nourriture, nourriture de ses frères, corps livré, sang versé, Eucharistie.
Restez fidèles à ces sacrements afin de grandir dans la foi et d’être toujours les témoins du Ressuscité. Pour que ces célébrations ne soient pas sans lendemain, nourrissez toujours votre vie chrétienne de prière et des sacrements, en particulier la réconciliation et l’eucharistie dans lesquelles se manifeste la miséricorde divine.
Frères et sœurs, vous tous ici rassemblés ! En cette Vigile Pascale où nous avons la grâce de célébrer ensemble ces sacrements : le baptême dont nous allons renouveler les promesses, et l’Eucharistie. Ces sacrements par lesquels nous entrons dans la vie de Dieu, dans l’intimité de Dieu, que notre étonnement fasse place à l’émerveillement, que cet émerveillement débouche en action de grâce, en chant de louange.
Cette année, nous avons le récit de la résurrection en saint Luc qui met l’accent sur le rôle des femmes, premières « envoyées » pour annoncer la Résurrection. D’ailleurs les quatre évangiles sont d’accord sur ce point fondamental, à savoir que les saintes femmes furent les premières à découvrir le tombeau vide et à recevoir un message qu’elles devaient transmettre aux Apôtres. Dans un contexte culturel où être témoin était quelque chose de réservé uniquement aux hommes (cf. Dt 17,6 ; 19,15), et où la parole d’une femme n’était pas reconnue légalement comme témoignage valide, l’évangile instaure une « révolution » qui ouvre des temps nouveaux. La Résurrection de Jésus apporte donc un changement radical à toutes les lois culturelles.
Ces femmes devenues témoins de la résurrection de Jésus, saint Luc leur donne des noms : Marie de Magdala, Johanna, et une autre Marie (Lc 24,10), la mère de Jacques (Mt 27,56). Désormais elles ne sont plus anonymes, mais des personnes ayant une relation profonde avec Jésus. Force est de reconnaître que quelque chose de similaire se passe aujourd’hui dans nos sociétés africaines et dans l’Eglise. La situation des femmes n’est pas toujours à égalité avec celle des hommes, leur voix n’est pas entendue par tous, pourtant leur dévouement et leur esprit de service sont les chemins par lesquels la foi passe d’une génération à une autre. Elles sont souvent un pilier dans de nombreuses communautés chrétiennes et dans la vie des paroisses. Femmes chrétiennes, je saisis cette célébration pascale pour vous saluer et vous encourager ! Si Dieu a confié l’important message de notre foi en avant-première aux femmes, quelle devrait être leur vraie place dans l’Eglise et la société ? Je vous laisse méditer sur cette question.
Frères et sœurs chrétiens, la fête de la résurrection nous rappelle notre devoir de témoigner de notre espérance dont le monde a soif. Ne gardons pas cette espérance pour nous seulement. Le Pape François nous y invite, d’une façon résolue, d’une façon qu’on peut dire nouvelle, d’une façon simple et d’autant plus percutante. La Bonne Nouvelle ne peut atteindre toute l’humanité que si chacun d’entre nous accepte de prendre sa part à la mission de l’Eglise toute entière.
Frères et sœurs, rendons grâce à Dieu ! Réjouissons-nous car nous savons que notre vie a un sens, une direction, qu’elle mène chez Quelqu’un, qui nous aime, nous crée, nous sauve et nous attend. Demandons au Seigneur de faire grandir en nous la capacité d’étonnement, d’émerveillement, d’action de grâce. Qu’il nous aide à accueillir sa vie pour pouvoir en témoigner. Joyeuse fête de Pâques à toutes et à tous ! Alléluia ! Amen !