De façon concertée, les autorités coutumières et religieuses de la capitale burkinabé ont livré, le 10 janvier courant, un message à la nation, intitulé, « Marchons sur les chemins de la paix ».
[Texte en intégralité]
« Marchons sur les chemins de la paix. »
En ce début d’année 2020, nous, autorités coutumières et religieuse du BF, d’une même voix adressons à toutes et à tous nos vœux de santé, de prospérité, et de paix. Ces vœux constituent pour nous des prières à l’intention de chacun de vous. La paix représente le vœu le plus cher que nous formulons pour vos personnes, pour vos familles et pour notre vivre ensemble en tant que Filles et fils d’une même nation. Nous souhaitons la paix dans les cœurs, la paix avec les autres, la paix grâce à la qualité de vie relationnelle que chacun contribuera à construire pour le bonheur de notre Burkina Faso.
L’actualité sécuritaire préoccupante que vit notre pays nous motive à nous adresser à tous pour encourager à persévérer dans l’espérance. Face à la pression des forces du mal contre notre nation se présente à nous le défi de chercher ensemble les chemins de la paix. Il est nécessaire que les Burkinabè et les amis du Burkina contribuent à trouver des formes d’engagement et des pistes de solutions face à ce phénomène afin que notre pays en sorte grandi et plus fort. Pour ce faire, il est urgent de définir de nouveaux chemins de dialogue à plusieurs niveaux.
Le renforcement du lien social
La lutte contre les forces du mal concerne fondamentalement la question du lien social des populations. A tous les fils et filles du Burkina Faso, nous lançons un appel à l’union et à la cohésion nationale contre les violences que subit notre pays. Cela nécessite que l’on taise les différences partisanes, qu’on promeuve la tolérance, qu’on travaille à la réconciliation et à l’inclusion, et qu’on cultive le respect de la vie.
Le niveau politique national
Au niveau politique national, la situation nous appelle à définir de nouveaux chemins de dialogues. Ce dialogue doit être inclusif et impliquer tous les citoyens à travers une synergie d’actions porteuse d’un plus grand engagement au niveau national. Un dialogue profond passe par une réconciliation ouverte et effective. La paix ne peut être atteinte sans réconciliation. Par ailleurs, nous félicitons toutes les initiatives de solidarité déjà développées en vue de soutenir les déplacés et les Forces de Défenses et de Sécurité. Nous souhaitons que ces expressions de solidarité nationale continuent de contribuer, de manière efficace, à exprimer notre proximité vis-à-vis de nos frères et sœurs éprouvés.
Pour les Gouvernants, il est important de travailler à la restauration de l’autorité de l’Etat, de continuer d’œuvrer pour améliorer la gouvernance ; de lutter contre la corruption sous toutes ses formes, de travailler à renouer les nouvelles générations avec les valeurs sociales, de demander l’expertise d’autres Etats plus outillés dans les luttes pour la sécurité. Il convient également d’être attentif au chômage des jeunes, à la pauvreté et la souffrance des populations et au renforcement de la croissance économique du pays.
Pour la Communauté Internationale, nous l’invitons à renforcer la coopération sous régionale et internationale pour un développement socio-économique harmonieux. Comme le dit un adage de la savane africaine « un seul doigt ne ramasse pas la farine ». Cette coopération permet dans ce sens de capitaliser les expériences diverses acquises face à ce phénomène qui s’avère global.
En somme, le Burkina Faso a plus que jamais besoin de la solidarité tant au plan national, sous régional, qu’international, condition sine qua non pour une société réconciliée dans la justice et la paix véritable et durable. Nous lançons un message à tous : pouvoirs administratif et politique, société civile, secteur privé, syndicats, autorités militaires et paramilitaires, autorités coutumières et religieuses, femmes, hommes, jeunes, dépassons les intérêts individuels et corporatistes pour nous mobiliser, regarder dans la même direction, promouvoir une culture du dialogue interreligieux, interethnique et intercommunautaire, sauver la richesse de nos différences légitimes et complémentaires, donner une réponse historique conséquente au défi sécuritaire de la Patrie.
Pour les autorités coutumières et religieuses, nous nous engageons à promouvoir à tous les niveaux le dialogue interreligieux élargi à la base, à travailler à dépasser l’ignorance de l’autre dans sa croyance et ses us et coutumes pour transcender la méfiance mutuelle et développer une confiance fraternelle, à sensibiliser sur le danger des attitudes, des comportements et des messages de nature à susciter la haine. En outre, conscient que la paix vient d’abord du Dieu Tout-Puissant, portons ensemble des prières continuelles à notre Créateur.
Nous confions notre, pays au Dieu de paix ! Il est la source de la Paix. Une Sagesse de chez nous dit ceci : « Qu’il est dur de pardonner mais oh…qu’il est beau de pardonner ! » (Les poèmes du Mogho Naaba). Notre conviction est qu’ « Allah appelle à la demeure de Paix et guide qui Il veut vers un droit chemin » (Sourates 10, verset 25). Nous souhaitons « Que l’Eternel lève la face vers toi et te donne la paix ! » (Nombres 6,26). Nous savons que « Le fruit de la justice est semé dans la paix par les artisans de Paix » (Jacques 3,18).
Que Dieu bénisse notre cher pays le Burkina Faso, notre sous-région et le monde entier.
Fait à Ouagadougou le 10 janvier 2020
- Sa Majesté le Mogho Naaba Bâongo
Président du Conseil Supérieur de la Chefferie Coutumière et Traditionnelle du Burkina Faso.
- + Philippe Cardinal OUEDRAOGO
Archevêque Métropolitain de Ouagadougou
- Cheick Dr Aboubacar DOUKOURE
Président de la Fédération des Associations Islamiques du Burkina ( FA.I.B)
- Pasteur Henri YE
Président de la Fédération des Eglises et Missions Evangéliques ( FEME)