Conférence :
Monsieur Clément P. SAWAODOGO
ancien ministre de l’administration territoriale du Burkina Faso
INTRODUCTION
La tenue du forum des mouvements d’action catholique, associations, groupes de spiritualité et services d’Eglise est à saluer. Elle fait suite en effet au congrès national du laïcat tenu en novembre 2011 et intervient comme une réponse aux questionnements multiples générés par cette grande instance.
Promouvoir le mouvement associatif du laïcat burkinabé, ou du moins en poser les jalons, tel est le défi qui se pose au présent forum ! En nous posant la question du « comment promouvoir », nous reconnaissons implicitement qu’il ya des insuffisances à combler. Pouvait-il en être autrement pour une si jeune Eglise, seulement centenaire, mais qui prend ses marques dans un contexte national et africain en pleine ébullition : pauvreté dominante et crises sociales, conflits et crises politiques, mutations sociales et transition douloureuse, etc.
De ce simple constat découle pour le laïcat burkinabé des missions et tâches surabondantes mais toujours à sa portée. Car l’Esprit Saint, qui poursuit son œuvre, gratifie toujours chaque chrétien de dons et charismes lui permettant de participer de manière dynamique et non statique à l’œuvre du salut. Les laïcs burkinabé peuvent donc et doivent être à la hauteur de leurs missions, aussi multiples soient- elles. Ils ne réussiront pas de manière strictement individuelle et isolée même si on admet que l’action du chrétien commence par l’individu lui-même pour s’étendre à la collectivité. D’où l’impérieuse nécessité pour les chrétiens laïcs de s’organiser, de se regrouper, afin de fédérer positivement et dynamiquement leurs initiatives, leurs ressources et leurs énergies.
Comment alors promouvoir cette dynamique associative du laïcat burkinabé dans le contexte de l’église et de la société actuelle ? Après avoir dressé l’état des lieux des mouvements , associations, groupes de spiritualité et services d’Eglise ( objet de communication n°1 ) et réfléchi sur la place et le rôle desdits regroupements dans l’église ( objet de la communication n°3) , je voudrais aborder avec vous le troisième volet de notre réflexion qui est relatif à la nécessaire promotion organisationnelle du laïcat et aux modalités pratiques d’optimisation de l’action des structures. Cette réflexion s’articulera autour de deux grandes questions :
1-Quels défis se présentent de nos jours aux organisations des laïcs burkinabé ?
2-Comment promouvoir une organisation suffisante et rationnelle du laïcat burkinabè pour faire face aux défis ?
I – LES DEFIS DU LAICAT BURKINABE
Les défis qui se présentent aux laïcs burkinabé découlent de la mission dévolue aux fidèles laïcs eux-mêmes en tant que baptisés, membres à part entières de l’Eglise, et nécessairement acteurs dans la société.
1-La mission qui incombe aux fidèles laïcs :
La constitution Lumen Gentium définit les laïcs comme étant « l’ensemble des chrétiens qui ne sont pas membres de l’ordre sacré et de l’état religieux reconnu par l’église. »
Etant incorporés au corps du christ par le baptême, ils sont « intégrés au peuple de Dieu, faits participants à leur manière à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, exercent pour leur part, dans l’église et dans le monde, la mission qui est celle de tout le peuple chrétien ».
On peut citer à foison les nombreuses références historiques et bibliographiques à la mission des laïcs chrétiens, bien avant le concile Vatican II. Le Pape Pie XII avait déclaré : « Les fidèles et plus précisément les laïcs se trouvent sur la ligne la plus avancée de la vie de l’église. » Ils doivent de ce fait avoir une « conscience toujours plus claire non seulement d’appartenir à l’église mais aussi d’être l’église …Ils sont l’Eglise ! »
Il est cependant indéniable que le Concile Vatican II a boosté de manière fortement révolutionnaire la vision de l’Eglise sur la mission des laïcs vis-à-vis de l’Eglise elle-même et du monde, en la repositionnant de manière plus visible et plus déterminante. Au delà du chrétien pris individuellement, le Concile a davantage ancré ses réflexions sur la forme organisée du travail des laïcs dans l’Eglise, en faisant émerger de nouveaux charismes, de nouvelles formes d’organisation que sont les mouvements, les associations et les communautés.
Enfin, puissions-nous dire, les chrétiens laïcs ont l’occasion de s’affirmer et d’impulser leur rôle de « sel de la terre », « levain dans la pâte » et « lumière du monde ».Mt 5,13-14.
2-La mission destinée aux organisations des laïcs
Vingt (20) ans après le Concile, en 1987, le synode des Evêques convoqué à Rome autour du Pape Jean-Paul II s’est à nouveau appesanti sur l’action des laïcs dans l’Eglise. Dans son exhortation apostolique christifideles laici (les fidèles chrétiens laïcs ; considéré comme l’un des plus grands référentiels en ce qui concerne les laïcs) qui a couronné les travaux du synode, le Pape Jean-Paul II a reconnu que les associations sont « un des fruits les plus significatifs du printemps de l’Eglise qui a éclos au Vatican II, un motif d’espérance pour l’Eglise et pour les hommes ».
Et encore : « Les mouvements et communautés nouvelles, porteurs d’une nouveauté inattendue et bouleversante sont la réponse suscitée par l’Esprit Saint à ce dramatique défi de fin de millénaire, une réponse providentielle ».
Toutes ces références et affirmations sont d’une indiscutable clarté. Mais les laïcs ont-ils su en saisir la portée ? Pourront-ils être à la hauteur des enjeux de la mission ? Pourront-ils faire face à ces défis doubles qui se présentent à eux , vis-à-vis de l’Eglise et vis-à-vis de la société ?
3 –Les défis du laïcat vis-à-vis de l’Eglise
Dans une approche systémique de l’Eglise burkinabè, et dans la vision de Vatican II, on peut aisément situer les tâches imparties aux laïcs organisés, membres à part entière, et partageant avec l’Episcopat et le clergé l’œuvre ministérielle, prophétique et royale, dans une convergence large et profonde, et avec pour finalité de porter l’évangile du Christ comme source d’espérance pour l’homme et la société.
Dans cette optique, nous pouvons énumérer cinq défis importants pour les laïcs organisés, vis-à-vis de leur église.
3-1-L’assistance au clergé
La moisson est grande et les ouvriers peu nombreux ! Cependant, le Maître de la moisson a déjà envoyé des moissonneurs que nous sommes tous. Si les prêtres, en nombre insuffisant, pour une jeune Eglise, se retrouvent isolés dans leurs tâches ministérielles, cela est dû pour une part à la vision dualiste du service de l’église et contre laquelle s’érige notre approche systémique.
A bien d’égards, le rapport entre clergé et fidèles s’apparente au rapport entre nos administrations néo coloniales africaines et le reste de la société. Or notre religion est une religion du peuple et l’Eglise le champ de la vigne auquel Dieu fait appel à tous.
Et pourtant l’Eglise s’est largement ouverte à la possibilité pour les laïcs de suppléer les prêtres dans de nombreuses tâches, exception faite des offices impliquant la consécration par l’ordre.
Le défi ici porte sur le développement des services d’Eglise impliquant une nouvelle vision de la participation des laïcs par eux-mêmes, et dont l’ancrage nécessite un encadrement efficient de la hiérarchie. A titre d’exemple, des laïcs pourraient s’engager dans la fonction de diacre permanent, connue dans d’autres églises du monde.
3-2-Le défi de l’évangélisation
Les laïcs organisés, quelqu’en soit la forme, participent à l’annonce de la bonne nouvelle. La participation très dynamique des catéchistes toutes tendances confondues est à louer. Le défi ici porte sur l’extension de l’œuvre d’évangélisation à tous les milieux notamment au sein des couches sociales spécifiques (jeunes, femmes, anciens) et des milieux socioprofessionnels, sur la base d’une pédagogie propre à chaque composante.
3-3- Le défi de la promotion d’une spiritualité forte et dynamique
Parce qu’ils sont en contact avec tous les milieux de la société, les laïcs dans le cadre d’une organisation rationnelle, doivent aider l’Eglise à promouvoir une spiritualité vivante au sein du peuple, enracinée dans le vécu quotidien et faisant appel aux méthodes et moyens de communication les plus avancées. Le défi ici pour le laïcat est celui d’apporter son concours à la construction d’une église dynamique, enracinée dans le vécu et fortement inculturée dans la vision déclinée par Vatican II.
3-4-Le défi d’une formation chrétienne complète
L’insuffisance de formation étant reconnue comme un handicap, un facteur limitant à la foi et à l’engagement des chrétiens, les laïcs organisés doivent inscrire la formation comme la priorité des priorités. Le défi à ce niveau est d’assurer une formation sur un double plan horizontal et vertical.
3-5-Le défi de la promotion de l’Eglise et de son auto prise en charge
Les organisations des laïcs doivent contribuer à faire grandir L’Eglise famille burkinabè dont le champ à labourer est immense. Elles doivent contribuer à sa grandeur institutionnelle qui implique bien évidemment des ressources intellectuelles, humaines et matérielles.
4- Les défis du laïcat vis-à-vis de la société burkinabè
Pour mériter d’être « les Ambassadeurs du Christ » à travers le monde, les laïcs organisés doivent tout d’abord s’assurer de bien connaître leur société, les angoisses et espérances de ses fils et filles, et en identifier les axes porteurs d’avenir. Autrement, ils courent le risque de passer à côté de la plaque, pire, de se comporter comme des marginaux sans aucune prise sur la réalité.
Au regard de la société burkinabé d’aujourd’hui, les défis qui se présentent aux laïcs chrétiens sont complexes, innombrables et complexes. Ils peuvent être regroupés en cinq (5) grandes catégories :
4-1-Le défi de la charité, de l’assistance et du partage
Les organisations des laïcs burkinabè ne peuvent faire l’économie du domaine caritatif par lequel bien d’hommes et de femmes baignant au quotidien dans la souffrance, la faim, la soif et la maladie attendent d’être soulagés. Comment ne pas être attentif aux cris de désespoir de ces milliers de personnes laissées pour compte par la société, alors même que le Christ nous invite à vivre une option préférentielle pour les pauvres et les opprimés ? Le devoir de charité et de partage qui incombe à tout chrétien s’impose d’avantage aux associations de laïcs qui doivent les pratiquer en toute circonstance.
4-2-Le défi de la transformation de la société
Sans aucune intention d’être véhicule de l’afro pessimisme, on peut affirmer que l’Afrique reste le terrain privilégié du développement inégal qui marginalise une large majorité de sa population, des injustices criardes, de la violence, de nombreux vices et de l’acculturation des jeunes, etc. Comment dans un tel contexte, les laïcs peuvent- ils se débiner de leur engagement social conséquent et combattif ?
L’exhortation post-synodale de 1988 pousse très loin : « Pour une animation chrétienne de l’ordre temporel, qui est celui de servir la personne et la société, les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à « la politique », à savoir l’action multiforme économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir organiquement et par les institutions le bien commun ». Et Vatican II renchérit : « C’est l’homme en effet qui est l’auteur, le centre et le but de toute la vie économico-sociale ».
Les défis qui en découlent pour les organisations des laïcs sont énormes et visent tous une mission de transformation de la société à un triple plan :
-politique : pour l’instauration de la justice, de l’équité, du sens du bien commun, d’une société fraternelle, solidaire, démocratique et de paix ;
-économique et social : pour éradiquer la pauvreté endémique (seuil de pauvreté toujours à 44,5% au Burkina Faso), promouvoir une répartition équitable des richesses, œuvrer au développement économique harmonieux et dans la préservation de l’environnement ;
-culturel : par la lutte contre les dérives sociales et la destruction des valeurs positives aggravées par le phénomène de la mondialisation, et pour la promotion d’une culture de paix, de tolérance et de vie fraternelle.
4-3- Le défi de l’éducation et de la formation complète du citoyen
Les organisations des laïcs se doivent d’inscrire dans leurs plans d’action des activités de formation au profit des citoyens. Il s’agit là d’actions éducatives purement laïques mais porteuses de la morale chrétienne : sensibilisation sur des thèmes socioculturels, alphabétisation/ éducation, etc. Ces actions dont les milieux de prédilection sont le monde rural, les quartiers périphériques des villes, les milieux jeunes et scolaires, la population féminine…, se couplent harmonieusement avec l’action évangélisatrice.
4-4-Le défi de l’organisation de la jeunesse
Cette frange de la population burkinabé étant largement majoritaire ( les moins de 30 ans constituent 72% de la population), le laïcat burkinabé doit en faire une préoccupation spéciale, cela d’autant plus qu’il s’agit d’une jeunesse qui vit la crise de la société dans son plus profond : chômage endémique, sous emploi, formation inadaptée, dures conditions de vie et d’études, irresponsabilité des parents et de l’Etat, menaces du VIH/SIDA, usage des drogues, alcools et autres substances psychotropes.
Dans de telles conditions, toute l’Eglise burkinabé et particulièrement les fidèles laïcs sont interpellés afin de sauver l’âme d’une jeunesse en proie à la perdition.
4-5-Le défi de la mobilisation des femmes et des anciens
On peut se réjouir tout naturellement de l’éveil des femmes chrétiennes qui se sont organisées au cours des dernières années. Cet élan doit être poursuivi et renforcé, les femmes étant reconnues pour leur attachement fidèle aux idéaux qu’elles épousent.
Reste un groupe social insuffisamment exploré, celui des personnes âgées ou anciens. Les organiser serait un atout supplémentaire à la réussite de la mission du laïcat.
II- PROMOUVOIR UNE ORGANISATION SUFFISANTE ET RATIONNELLE DU LAÏCAT BURKINABÉ POUR FAIRE FACE AUX DÉFIS PRÉSENTS ET FUTURS
De nos jours, les laïcs ont le droit (en plus du devoir) de créer librement leurs associations dans le cadre bien compris du règlement édicté par l’Eglise. Le code de droit canonique à cet effet mentionne que « les fidèles ont la liberté de fonder et de diriger librement des associations ayant pour but la charité ou la piété, ou encore destinées à promouvoir la vocation chrétienne dans le monde » Canons 298-329.
Cette autorisation est cependant assortie du « lien nécessaire avec l’autorité ecclésiastique », ce qui est parfaitement compréhensible pour éviter des dérives préjudiciables.
Cette possibilité quasiment sans limite de création d’organisations du laïcat étant établie, nous pouvons nous poser les questions suivantes : le laïcat burkinabé est-il suffisamment organisé ? Les associations existantes fonctionnent-elles correctement ? Existe-t-il une unité d’action réelle entre les différentes organisations orientée vers la réponse aux défis énumérés ? De ces questions découlent un certain nombre de recommandations en vue d’améliorer la situation.
1 -Laïcs suffisamment organisés
Pour mener à bien leur mission et faire face à leurs défis multiples, les laïcs doivent être suffisamment organisés. Leur force doit résider dans leur organisation. Il faut pallier en urgence la faiblesse organisationnelle du laïcat burkinabé qui dispose d’un répertoire associatif très peu fourni, si on y excepte les CCB et les services qui leur sont rattachés en raison de leur spécificité.
A titre d’illustration, les organisations structurées de laïcs burkinabé répertoriées se comptent par dizaines (mouvements d’action catholique = 7 ; groupes de spiritualité = 14 ; associations catholiques laïques = 28 ; services d’église = 8) alors que 122 organisations internationales sont répertoriées sur le site du Conseil Pontifical pour les Laïcs. Non seulement il faudrait créer encore de nombreuses associations pour mailler tous les compartiments sensibles du service de l’Eglise et de la société, mais aussi il faut consolider celles existantes.
Bien de domaines de la société restent encore très faiblement impliqués au nombre desquels on peut citer :
-le milieu jeune : très peu de mouvements y sont implantés, même que certains comme la JTC ont disparu, d’autres existent mais bien affaiblies ;
-les personnes âgées : tout en sachant profiter de leur sagesse, il faut les aider dans les problématiques associées à leur gestion. ;
-les milieux socioprofessionnels : les chrétiens de chaque domaine d’activités doivent être encouragés à y créer soit un mouvement soit une association ;
-le mouvement social organisé (activiste ou de type syndical) : ce milieu a été complètement abandonné par les chrétiens ;
-l’engagement dans la politique : bien que relevant plutôt de l’initiative individuelle, l’organisation du laïcat doit le prendre en compte sous une forme appropriée ;
-l’engagement pour la paix et le dialogue œcuménique : des laïcs devraient en faire leur spécialité, les initiatives existantes nous paraissant encore timides. Il existe à cet effet une commission Justice et Paix créée par la Conférence Episcopale mais qui n’est pas suffisamment relayée par une action associative solide.
Cette liste n’est pas exhaustive. Mais alors, comment créer tous ces regroupements qui nous font défaut ?
Nous devons regarder dans trois directions :
-des initiatives vigoureuses et hardies à prendre par le Conseil National des Laïcs qui doit être une structure d’initiative et à l’offensive ;
-l’encouragement nécessaire des chrétiens par la hiérarchie ecclésiale, souvent plus préoccupée par les services d’Eglise que par l’organisation des laïcs en mouvements et associations ;
-enfin, l’esprit d’initiative et de leadership des chrétiens eux-mêmes souvent plus enclins au moindre effort et surtout peu initiés et formés pour animer des associations.
2– Organisations vivantes, et fonctionnelles et bien structurées
Il y a lieu de se préoccuper également de la vitalité des associations de laïcs existantes. Si l’on peut se réjouir du dynamisme des groupes de prière et de spiritualité marqués par le renouveau charismatique, nous devons en revanche travailler à donner plus de tonus aux mouvements et associations. Nombre d’entre eux sont faiblement structurés, se limitant à la capitale ou à quelques villes, ou encore incapables de tenir régulièrement leurs instances.
Pour que nos organisations soient fonctionnelles et fortes, nous devrions nous assurer que chacune d’elles remplit les critères suivants :
-la pertinence de sa mission et la conformité de son action avec sa mission définie dans ses propres textes et approuvée par l’autorité. En effet, il ne servirait à rien par exemple de se déclarer mouvement pour n’être en réalité qu’un groupe de prière ou une amicale !
-l’organisation fonctionne réellement, organise des activités dans le bon rythme, mobilise de nombreux membres et dispose d’animateurs permanents et dévoués ;
-l’organisation dispose d’un plan d’action visant à atteindre des résultats à court, moyen et long termes ; elle doit être capable de mobiliser les ressources humaines et matérielles à la hauteur de sa cause ;
-l’organisation rayonne, rend visible son action à travers une communication efficiente (un travail parfait mais non connu ne peut qu’avoir des effets limités) ;
-l’organisation chrétienne recherche toutes les voies possibles de mutualisation de ses efforts avec d’autres partageant des missions similaires ou le même cercle de rayonnement.
3- Diversité, unité d’action, mutualisation et coordination
La réponse aux défis multiples et communs implique l’établissement d’une chaine de responsabilité et de solidarité agissante des associations des laïcs chrétiens, partageant toutes la même finalité mais appelées à exercer des charismes divers et variés. Notre force résidera au final dans notre unité d’action autour du même Christ sauveur et animés tous du même Esprit Saint.
Dans le cas d’espèces, la diversité est tellement grande que la question de l’unité d’action se traduit difficilement en termes concrets. Il faudra donc encore plus de leadership dans le pilotage des structures faitières. Quelques pistes de solutions peuvent être explorées dans ce sens :
-rendre effective la coordination par diocèse des structures locales des associations et mouvements, sous la responsabilité des conseils diocésains des laïcs ;
-promouvoir au niveau national un premier niveau de coordination par type d’association (en fonction de la nature de la mission) ; à titre d’exemple, les mouvements d’action catholique peuvent animer une coordination entre eux, les regroupements socioprofessionnels également, de même que les associations de spiritualité, les associations des couches spécifiques (jeunes, femmes, anciens), etc.
De telles formes de coordination sont plus pertinentes et aptes à promouvoir la mutualisation des énergies et des initiatives tant recherchée. Aller directement à une coordination générale nationale, c’est se retrouver dans un fourre-tout, sans efficacité évidente.
-promouvoir la coordination informelle des associations entre elles en plus de celle formalisée. Les ressources étant rares dans tous les domaines, il conviendrait en effet de se les partager. Nous pensons surtout aux cadres de formation chrétienne de même qu’à la mise à disposition réciproque de formateurs. Par ailleurs, certains sujets d’intérêt commun pourraient regrouper plusieurs mouvements ou associations autour d’actions à mener ;
-favoriser un plus grand encrage de l’organisation faitière de laïcs au plan national. Le conseil national des laïcs (CNL) créé sous la forme de la Communauté chrétienne dans les années 1970, ne doit plus trainer à prendre ses marques et à assurer un véritable leadership du laïcat burkinabé. Nanti d’une direction solide, le CNL doit se donner les moyens d’une institution forte, responsable devant l’épiscopat et redevable vis-à-vis des associations dont il est l’émanation. Il doit de ce fait disposer d’un siège permanent digne de ce nom et de services capables d’assurer sa mission tentaculaire.
Quatre services essentiels, outre son secrétariat, doivent particulièrement être créés et gérés par le conseil : l’appui à la création et l’enregistrement des associations, la formation des laïcs (des responsables notamment), la mobilisation des moyens d’action et la communication. En outre, et à titre de projet phare, le CNL doit œuvrer, avec l’appui de l’Eglise, à la création d’une école de formation des laïcs. Un tel projet ambitieux et « original » permettrait d’établir un centre d’excellence, un cadre d’échanges d’expériences et d’approfondissement de la foi et de l’engagement des laïcs.
Ainsi, sans avoir l’ambition d’un quelconque dirigisme sur les associations, le CNL serait capable de jouer son rôle de pilote, d’impulsion et de coordination.
4- Tutelle et encadrement ecclésial
En rappel, les associations des fidèles laïcs se créent librement, mais sous le contrôle de l’autorité ecclésiastique compétente. Il en découle que ladite autorité est appelée à exercer un double rôle de tutelle et d’encadrement.
La tutelle exercée par la Conférence épiscopale, l’Evêque ou le Curé le cas échéant, ne saurait être une tutelle pesante qui porterait atteinte à l’autonomie organisationnelle de l’association consignée dans ces textes fondateurs. Elle donne la possibilité à l’autorité de s’assurer du déroulement normal de la mission et de sa conformité avec l’esprit de l’évangile et les règles établies.
Quand au principe d’encadrement, celui-ci relève plus que de la nécessité ; il est de l’obligation. Il se traduit bien souvent par la désignation d’un assistant ecclésiastique (un aumônier ou un conseiller).
Les organisations des laïcs burkinabé, en dépit de leur rôle d’assistance et de suppléance au clergé, attendent encore beaucoup des autorités de l’Eglise. L’Eglise elle-même est jeune mais l’organisation du laïcat l’est davantage. Pour que celui-ci soit nanti de la capacité à aider l’Eglise, l’Eglise doit déjà le soutenir sur quatre axes essentiels :
-l’appui multiforme à l’organisation faitière des laïcs en vue de sa structuration et de « sa capacitation » ;
-le soutien aux laïcs pour qu’ils s’organisent davantage et à tous les niveaux ;
-la formation complète et continue des animateurs d’associations et de leurs membres ;
-la désignation effective d’encadreurs auprès des organisations.
En conclusion et comme on le perçoit clairement, la moisson est grande, les défis énormes, mais les ouvriers bien que nombreux ne sont pas encore outillés. Prions donc le Maitre de la moisson afin qu’il nous donne à nous laïcs burkinabé, lumière et force pour assumer efficacement et fidèlement notre responsabilité dans l’Eglise peuple de Dieu et dans la société burkinabé.
Je vous remercie